Depuis 1992, la gestion de l’eau et notamment de l’accès à l’eau potable est considérée comme un enjeu essentiel pour le développement socio-économique par les Nations Unies. Pour autant, en 2019, l’OMS et l’UNICEF s’accordaient pour établir que 2,2 milliards de personnes n’avaient toujours pas accès à l’eau potable de manière sûre et continue. Le Cameroun fait partie des pays dont la situation est des plus critiques avec 34% de la population qui n’a pas accès à l’eau potable.
D’abondantes ressources en eau
En 2010, une étude réalisée par Global Water Partnership (GWP) démontrait que les besoins en eau du Cameroun ne représentaient que 4,14% des ressources en eau disponibles du pays, ce dernier disposant d’importantes réserves. En effet, GWP a évalué que la pluviométrie variait entre 561,1 mm et 9763,9 mm par an en fonction des régions. En comparaison, la France connaît une pluviométrie variant entre 500 et 2000mm par an. Par ailleurs, le Cameroun comporte 5 grands bassins et 3 grands réservoirs souterrains. Cependant, le rapport démontre une variabilité forte entre les régions. Les bassins les plus importants semblent être situés au sud, là où la pluviométrie est la plus conséquente. De même, le rapport souligne une variabilité importante causée par une certaine sensibilité aux facteurs externes, notamment ceux du réchauffement climatique. Pour ces raisons, une gestion de l’eau attentive et durable est nécessaire afin de faire face aux besoins du pays et de ses habitants.
Des trajets longs et périlleux
En l’état, malgré l’abondance des ressources, la majorité des habitants n’ont pas facilement accès à une eau propre à la consommation. La répartition des ressources et des infrastructures entraîne d’importantes inégalités entre les zones rurales et urbaines. En zone rurale, seulement 43,5% des habitants ont un accès à l’eau potable, tandis que la majorité restante doit parcourir des trajets parfois longs et périlleux. Pour certains habitants, l’eau des rivières et marigots constitue la seule source d’eau accessible. Or, pour être potable, ces eaux nécessitent un traitement ou un filtrage qui n’est que rarement réalisé par les consommateurs. Par ailleurs, l’accès aux points d’eau reste une véritable épreuve pour ces habitants puisque les routes empruntées sont très peu entretenues et fortement accidentées. De même, les sources d’eau étant sujette à de fortes variabilités en fonction de l’environnement, il n’est pas rare qu’elles tarissent lors de la saison sèche. Dans ce contexte, il faut compter plus d’une heure par jour chaque jour pour aller s’approvisionner en eau.
Aissatou Hamma, une ménagère dans une bourgade du département du Diamaré, nous fait part de sa souffrance en ces termes: « Que faire, sans eau, en cette période, les rivières sont à sec. Nous avons entendu que le chef de l’Etat va nous doter des forages mais on ne voit rien. Les communes ne font rien et lorsqu’un forage est réalisé, il n’est pas de qualité. Je vous assure que seuls les forages réalisés par le PNDP [Plan National de Développement Participatif] sont fiables ».
Développement des maladies hydriques
D’autre part, les conditions d’approvisionnement favorisent le développement de maladies comme le paludisme. Les moustiques se développent dans les mêmes sources que celles dans lesquelles les humains s’approvisionnent. De même, les recensements réalisés dans différents dispensaires en zones rurales démontrent qu’une majorité des consultations sont dues à des maladies hydriques. Ces maladies hydriques peuvent être classées en deux grandes catégories : les maladies liées aux micro-organismes et produits chimiques et les maladies liées à manque de structures d’assainissement et d’hygiène. Selon le Ministère de la Santé Publique du Cameroun (MINSANTE) et l’OMS, en 2019 le taux de mortalité attribuable à l’insalubrité de l’eau, aux déficiences du système d’assainissement et au manque d’hygiène est estimé à 45,2 décès pour 100 000 habitants.
Par ailleurs, ces maladies touchent particulièrement les enfants. A titre d’exemple, au sein de la commune de Guider, qui se situe dans la région Nord du Cameroun, le déficit d’eau potable est à l’origine de 256 cas d’hospitalisation et de 14 décès enregistrés dans les formations sanitaires en 2020. Les enfants de moins de 5 ans représentent 65,23% des cas d’hospitalisation.
Objectifs futurs
Face à la situation actuelle en matière de gestion de l’eau et des conséquences qu’elle entraîne, l’État camerounais ainsi que nombre d’instances intergouvernementales, de bailleurs de fonds et d’ONG se sont mobilisés afin d’améliorer l’accès à l’eau potable.
Depuis 2005, le Cameroun s’est aligné sur les objectifs des Nations Unies et s’est engagé à intégrer le Plan d’Action National de Gestion Intégrée des Ressources en Eau (PANGIRE). Ce plan, mis en valeur par le Sommet Mondial sur le Développement Durable qui s’est tenu à Johannesburg en 2002, permet d’améliorer la gestion des ressources en eau tout en préservant l’environnement et en assurant la pérennité des ressources. Depuis lors, le gouvernement camerounais adapte ses stratégies afin de répondre aux objectifs fixés. A l’heure actuelle, le PANGIRE s’est adapté à l’Agenda 2030 fixé par l’ONU et tout particulièrement à l’objectif n°6 : « Garantir l’accès de tous à l’eau et à l’assainissement et assurer une gestion durable des ressources en eau ». Depuis 2004, La gestion de l’eau au Cameroun est décentralisée, ce sont les communes qui sont chargées de mettre en place les infrastructures nécessaires à la distribution de l’eau pour leurs habitants. Pour autant, les difficultés rencontrées par les services publics comme le manque de moyens financiers, empêchent d’atteindre les objectifs visés. C’est pourquoi les instances internationales telles que l’ONU ou la Banque Mondiale, ainsi que des États comme le gouvernement français ou encore des ONG se sont mobilisés afin de financer et de développer des programmes qui visent à améliorer l’accès à l’eau potable.
TPSF, conscient des dangers que cette situation entraîne, a décidé de mettre en place un programme Cameroun afin de mettre en œuvre plusieurs projets répartis sur tout le territoire et permettant d’améliorer sensiblement les conditions de vie des populations.
Blandine Rollet